Editorial

Les contrats d’assurance emprunteur : toujours aussi difficiles à comprendre…

Les professionnels se sont engagés depuis le 1er juillet 2009 à remettre une FSI « fiche standardisée d’information» aux futurs emprunteurs. Cette fiche a pour but d’afficher clairement les éléments essentiels des contrats, pour en permettre une comparaison aisée par l’emprunteur. On considérait donc, et sans doute à juste titre, que la rédaction des contrats était trop complexe, sur des points fondamentaux tels que la nature « forfaitaire ou indemnitaire » de la garantie Incapacité, et la prise en charge ou non des personnes sans activité au moment d’un sinistre. Au 1er trimestre 2011, après avoir analysé 35 contrats d’assurance, BAO a pu constater que les contrats demeuraient toujours aussi hétérogènes dans leur rédaction et qu’il était toujours aussi complexe de comprendre si un contrat était indemnitaire ou forfaitaire, lié à l’activité professionnelle de l’emprunteur ou non, et ce même par un professionnel de ce marché…

Le droit de choisir ne se monnaie pas….

La convention AERAS protège depuis 2006 les emprunteurs malades, à qui une assurance peut être exigée pour leur accorder un prêt, sans que cette assurance ne puisse leur être fournie par la banque dans des conditions optimales. Les banques sont donc tenues depuis longtemps d’accepter toute assurance externe mais aussi toute autre forme de couverture proposée par l’emprunteur (assurance vie, contrat d’assurance collective, hypothèque…). La convention AERAS a été rénovée le 1er février 2011 pour accroître les garanties accordées aux emprunteurs malades, en renforçant les garanties invalidité, en demandant aux assureurs d’intégrer les progrès de la médecine dans leurs tarifications. Elle a également élargi le dispositif de mutualisation des surprimes d’assurance pour les emprunteurs malades aux revenus modestes.  Paradoxalement, cette convention mentionne désormais la possibilité pour les banques d’appliquer « des frais de délégation » aux emprunteurs en cas d’assurance externe. Ce point est en contradiction avec la 1ère convention AERAS qui interdisait toute pénalisation de l’emprunteur sur son crédit. Il contredit aussi la loi Lagarde (*) qui précise que le choix d’une assurance externe ne peut pas pénaliser l’emprunteur sur le taux de son crédit. Pour respecter l’esprit de la loi il faut évidemment comprendre taux effectif global du crédit, incluant donc toute forme de frais… Un droit de choisir ne peut être monnayé, sinon il devient bien relatif…

La loi Lagarde et la liberté de choisir son assurance emprunteur

Depuis Septembre 2010, avec l’entrée en vigueur de la Loi Lagarde (*), tout emprunteur peut choisir « librement » son assurance de prêt immobilier dès lors que les garanties sont équivalentes à celles de la banque. La banque ne peut alors pas modifier les conditions de prêt du fait du choix d’une assurance externe, et doit justifier de tout refus d’assurance sur le plan de la non équivalence de garanties. Mais en réalité, l’offre de prêt n’est pas émise avant la souscription d’assurance puisqu’elle l’intègre dans son contenu. Or, avant l’émission de l’offre de prêt, la banque n’a aucun engagement formel quant à l’octroi du crédit et de ses conditions...Si la loi est une avancée significative qui affirme clairement la liberté de l’emprunteur dans son choix d’assurance, elle ne lui donne finalement aucun moyen opérationnel de la faire respecter. Il signe toujours une offre de prêt liée à une assurance, dans un contexte commercial où il a avant tout besoin d’un prêt… Pour rendre la loi plus efficace de la loi pour tous les emprunteurs, 3 pistes doivent donc être étudiées : une dissociation plus formelle entre l’offre de prêt et l’offre d’assurance que l’emprunteur pourrait accepter séparément, un meilleur encadrement de la notion d’équivalence des garanties, un droit de renonciation à l’assurance avant le déblocage des fonds, assorti d’une obligation pour l’emprunteur de présenter simultanément une assurance équivalente, un droit de résiliation annuel de l’assurance par l’emprunteur, comme pour tout contrat de prévoyance, même si l’assureur, lui, reste engagé sur la durée. Dans ce cas également l’emprunteur devra présenter une assurance équivalente.
PUBLICATION CCSF ASSURANCE EMPRUNTEUR 11/2020 :
Bilan de l’assurance emprunteur :
10 ans après la Loi Lagarde
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Les contrats bancaires au regard des critères du CCSF